Il fait chaud ce mardi 26 février sur le petit aérodrome d’Amiens-Glisy : 21 degrés au
thermomètre, un beau ciel bleu, et la météo annoncée l’aveil est encore plus optimiste. Pas mal pour une journée de printemps…en Picardie !
Aujourd’hui, j’ai rendez-vous chez notre prestataire d’Amiens pour la découverte d’une discipline qui m’est totalement étrangère : l’ULM, oui mais « pendulaire ». Pour beaucoup de néophytes du milieu de l’aérien, cette version représente l’archétype de l’ULM : une cellule faite de tubes en métal, une aile de deltaplane sur le dessus et un petit moteur propulsif à l’arrière pour faire quitter l’ensemble du plancher des vaches.
ZOOM ULM PENDULAIRE
L’appellation « ULM » regroupe en fait des aéronefs très divers comme le multiaxes, le paramoteur, l’autogire, le ballon ultraléger, l’hélicoptère ultra léger et, bien sûr, le pendulaire ! Les ULM sont des aéronefs ultra légers motorisés (moins de 450 kg pour un biplace avec passagers et essence à bord !). Cette spécificité en fait des aéronefs assez épurés techniquement (construction en tubes d’alliage d’aluminium couverts de toile ou parfois matériaux composites) et moins onéreux que les avions de tourisme. Ils volent généralement assez lentement et peuvent atterrir sur des pistes très courtes.
En ce qui concerne plus spécifiquement les pendulaires biplaces, il s’agit très simplement d’une aile de deltaplane montée sur un chariot propulsé par un petit moteur, généralement de 60 à 100 chevaux, avec un ou deux sièges en configuration « tandem »
Arrivé sur le terrain au niveau de la tour de contrôle (AFIS pour cette plateforme), je me dirige directement vers les hangars verts style « seconde guerre mondiale » de notre prestataire où Eric, le directeur de la structure, m’attend. L’intérieur des lieux nous plonge directement dans une ambiance mêlant aéronautique et aventure où les photos sur les murs nous rappellent les différents voyages réalisés par l’équipe de l’entreprise : Madagascar, Maroc, Croatie… des destinations de rêve, le tout en ULM pendulaire ou autogire. De vrais Jeep du ciel ces engins !
Eric vient à ma rencontre en me rappelant que notre vol ne nous mènera pas jusque dans cescontrées lointaines. Ce sera pour une prochaine fois.
Au programme, un petit vol découverte de 15 minutes (baptême de l’air) suivi d’une initiation de 30 minutes. Une formule sympathique permettant à la fois d’être spectateur puis acteur de son vol. Le temps de boire un café, de récupérer un casque (très similaire à ceux utilisés en moto) et nous voilà paré pour le décollage.
Nous nous dirigeons ensuite vers le tarmac devant le hangar – mais côté piste cette fois – ou notre monture, paisible, nous attend pour le vol. « C’est une petite machine biplace motorisée par 62 chevaux » me commente Eric. Vu de loin, c’est une frêle machine et vu de près, aussi ! Là étant tout le charme de l’activité ou la complexité habituelle des machines volantes laisse place, pour les ULM, à des aéronefs très épurés et finalement très simple de compréhension. Un bref coup d’œil sur la planche de bord me confirme dans mes pensées : un altimètre, un compas, un tachymètre, un indicateur de température d’huile et une petite radio. Pas plus, pas moins.
Pour la partie baptême, je serai assis en place arrière. Place normalement réservée à
l’instructeur ou au passager tandis qu’Eric sera en place avant. Une fois sanglé par une ceinture que les voyageurs qui côtoient souvent les avions de lignes reconnaitront et la mise en route effectuée, le roulage en direction de la piste 12 se fait sans problème. Le ressenti du moteur 2 temps situé à une cinquantaine de centimètres derrière moi est impressionnant. Typique de de ce type de moteur, les vibrations sont beaucoup plus importantes que celles ressenties dans une machine à moteur 4 temps. D’autant plus que l’absence de cabine autour de soi ne doit pas améliorer le ressenti… En comparaison à un avion ou à un autre aéronef, le plus troublant est sans doute la sensation de liberté. Pas de cabine, juste l’environnement naturel
pour être en communion avec les éléments..
Aligné sur la piste 12, mon commandant de bord m’annonce que l’on va décoller et pousse vers l’avant la petite manette des gaz située curieusement en haut du palonnier de droite. Ensuite, ça pousse vraiment très fort ! La sensation d’être lancé à pleine vitesse sur une piste en herbe (forcément moins lisse qu’une piste bitumée) à quelques 30 cm du sol est vraiment grisante. Puis, c’est le décollage avec une incidence relativement importante. On venait de « perdre terre » comme le disait Clément Ader.
La montée jusqu’à environ 700 ft et nous partons pour une petite virée en direction du sud de la ville où Eric doit me démontrer les possibilités données par la machine. « 120KM/H avec du vent dans le dos, c’est la vitesse de croisière » me dit Eric.
Voyant que l’expérience me plaît et après quelques manœuvres, mon pilote me propose de partir dans des virages à grande inclinaison : 45° puis 70°. Que du bonheur !
Les 15 minutes franchis à l’horamètre, il est temps de revenir au terrain ou l’envie de piloter est à son paroxysme.
Changement de place et je me retrouve en place avant, place pilote, avec toujours cette
planche de bord désespérant nue…Pour le pilote avion que je suis, cette sensation est
relativement déroutante… Le démarrage moteur puis arrive le début du roulage et ses
premières difficultés. « Piloter un ULM pendulaire, c’est réapprendre à piloter » me dit Eric. Effectivement, la plupart des commandes sont inversées. Ainsi, au sol, pour tourner à gauche, il faut pousser la pédale de droite et inversement, pour tourner à droite, pousser la pédale de gauche. Drôle de machine !
Aligné sur la piste, la mise de la pleine puissance et dans un mouchoir de poche, nous voilà déjà dans le ciel d’Amiens. Le plus frappant après ces quelques secondes de vol est probablement la force du vent frappant le visage. La sensation, qui ajoute au charme de cette activité de plein air, est très similaire à celle ressentie en moto. Heureusement que le casque intégral et la veste, prêtée ce jour-là par mon pilote, sont là pour nous couper en partie des éléments. En se penchant sur le côté, le vide. Mais pas d’inquiétude pour ceux ayant le vertige puisque nos pieds ne touchent pas le sol !
Après la montée initiale et le premier virage, en direction du sud de la ville, Eric me donne les commandes de la machine et là, deuxième surprise. La encore, la sensation de piloter une machine avec des commandes inversées est très prononcée (en comparaison au pilotage d’un avion). Lorsque l’on pilote un ULM pendulaire, tout comme un delta, il faut envoyer le cadre (jargon d’ULMiste pour qualifier la commande servant au pilotage pour monter/descendre, tourner à gauche/droite) dans le sens inverse au virage. C’est le principe de base du pilotage d’un ULM pendulaire. De même pour monter et descendre. Pour monter, il faut pousser sur le cadre et pour descendre, il faut tirer dessus. La transition avion/Ulm pendulaire se fait doucement.
De là-haut, c’est réellement une séance de pilotage plaisir. Pas de contraintes particulières, une liberté bien plus grande d’évolution, une vitesse permettant d’apprécier les paysages. Ce jour-là, la nature nous laissa même le privilège d’observer un petit groupe de biches dans un champ à seulement 500ft au-dessus du sol en périphérie de la ville. Moteur totalement coupé pour ne pas les effrayer, les bêtes se laissèrent observer de là-haut !
Alors si comme moi vous voulez découvrir la liberté vraie, découvrez l’ULM pendulaire. Mais attention, je vous préviens, le virus du vol s’attrape très rapidement !